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Epaulés par les mercenaires russes du Groupe Wagner, les soldats maliens sont entrés dans la ville qui était depuis onze ans sous contrôle des rebelles à majorité touareg. Une victoire symboliquement forte.
SOULEYMANE AG ANARA / AFP
Cette victoire militaire, une grande partie du Mali l’attendait depuis une décennie et les officiers au pouvoir, à Bamako, ne devraient pas manquer d’en tirer profit. Par un communiqué, mardi 14 novembre, pourtant lapidaire et sans triomphalisme, publié sur X (ex-Twitter), l’armée malienne a annoncé sa reconquête de Kidal, considéré jusqu’ici comme le bastion inexpugnable de la rébellion.
 
Plus de onze ans après en avoir été chassé par les rebelles indépendantistes du Mouvement national de libération de l’Azawad et les islamistes d’Ansar Eddine, l’état-major des forces armées du Mali a annoncé, mardi en fin de matinée, que ses soldats ont « pris position dans la ville de Kidal », et appelé « la population au calme et à la sérénité ».
 
Quelques minutes plus tard, le colonel Assimi Goïta, le chef de la junte, confirmait l’information sur X. « Notre mission n’est pas achevée », précisait-il, celle-ci consistant « à recouvrer et à sécuriser l’intégrité du territoire, sans exclusive aucune ».
 
La veille au soir, sentant la victoire approcher, l’armée malienne avait indiqué que « les dernières poches de résistances des groupes armés terroristes tombent les unes après les autres. Les FAMa [Forces armées maliennes] continuent de débusquer les terroristes aux abords de la ville de Kidal ».
 
Les soldats maliens, épaulés par des paramilitaires russes, arrivés depuis décembre 2021 sous l’étiquette du groupe de mercenaires Wagner, n’étaient alors qu’à une quinzaine de kilomètres de la ville. Nouvelles alliances décisives Selon un fin connaisseur des lieux, leur entrée à Kidal, fief des quatre rébellions touareg depuis l’indépendance en 1960, et symbole d’insoumission au pouvoir central de Bamako, a été notamment rendue possible par les bombardements répétés des drones : des Bayraktar TB2, de fabrication turque, qui ont commencé à opérer dans la nuit du 3 au 4 novembre.
 
Les nouveaux équipements achetés par le Mali et les nouvelles alliances nouées par la junte semblent avoir été décisifs, alors qu’une précédente tentative de reconquête, en 2014, avait tourné au fiasco. Le départ des casques bleus de la mission des Nations unies de leur base le 31 octobre, sommés de quitter l’ensemble du territoire par les autorités de transition avant la fin de l’année, avait au préalable préparé le terrain pour un affrontement entre les forces gouvernementales et les rebelles du Cadre stratégique permanent pour la paix, la sécurité et le développement (CSP-PSD).
 
Ces derniers, qui tenaient la ville et avaient pour eux la maîtrise de l’environnement, n’ont finalement pas été en mesure de résister. Les insurgés, en grande majorité des Touareg, ont abandonné Kidal, mardi, sans combattre, pour se replier plus au nord. Ils laissent derrière eux une ville fantôme, déjà largement désertée par sa population civile dispersée entre des camps de déplacés improvisés à proximité de la frontière algérienne et des campements de brousse au milieu du désert.
 
Une victoire personnelle pour le colonel Goïta Faute de réseau téléphonique - celui-ci a été coupé vendredi par les rebelles en prévision de l’offensive - et devant le peu d’observateurs indépendants sur place, aucun réel bilan humain des combats n’était encore possible mardi en fin de journée, même si le chef de la junte assure que de « lourdes pertes » ont été infligées à l’ennemi.
 
Les jours précédents, le CSP-PSD avait publié sur les réseaux sociaux des photos d’enfants présentés comme des victimes des bombardements. La reprise de Kidal constitue assurément une victoire personnelle pour le colonel Assimi Goïta. Arrivé au pouvoir avec un agenda souverainiste et sur une promesse de reconquête des territoires perdus, celui-ci va pouvoir se targuer d’avoir rempli son engagement auprès du peuple malien - dont l’orgueil national a été blessé par plus d’une décennie d’effondrement de l’Etat, les velléités séparatistes des rebelles et la présence de forces internationales, françaises.
 
Dans la perspective de la future élection présidentielle, dont la date demeure inconnue, nul doute que cette victoire sera un atout pour le président de la transition qui, depuis le renversement d’Ibrahim Boubacar Keïta en août 2020, s’emploie à transformer sa position de chef putschiste en président élu.
 
Les quelques célébrations constatées, mardi après-midi, sur la place de l’Indépendance à Bamako, n’ont certainement pas dû réfréner ses ambitions. L’autre bénéficiaire, moins attendu, de cette reconquête pourrait être Iyad Ag Ghali, l’émir du Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans. Figure de l’insurrection touareg des années 1990 avant de basculer dans le djihadisme et de devenir le plus haut représentant d’Al-Qaida dans la région, celui-ci a toujours entretenu une relation ambiguë avec les chefs rebelles actuels.
 
Vexé de ne pas avoir été choisi comme leur premier dirigeant en 2012, il n’avait, en revanche, pas rompu les liens avec ses anciens alliés. Dans le contexte actuel de défaite, il pourrait tenter de les attirer vers lui. « A mon avis, Iyad Ag Ghali sera le grand gagnant, car les mouvements défaits ne s’exileront pas, ne se rallieront pas à Bamako et tenteront de résister.
 
Avec les exactions des soldats et des mercenaires de Wagner, les rangs djihadistes vont se renforcer », prédit un expert de la région. Dans son premier communiqué confirmant son départ de Kidal, le CSP-PSD a indiqué s’être retiré de son fief « pour des raisons stratégiques », tout en affirmant que « la lutte continu[ait] ».

Source Le Monde

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